• Immigration

    Protection sociale et colonies de peuplement : la grande iniquité

    L’occidentisme, selon Alexandre Zinoviev, est « un phénomène unique en son genre et exceptionnel dans l’histoire de l’humanité… Il n’y en aurait plus jamais dans l’avenir si, d’aventure, il se dégradait et quittait la scène historique » (1). Or, des dizaines de millions d’étrangers vivent en occident stricto sensu sans s’y assimiler. On peut envisager que ces migrants deviennent majoritaires (2). Si tous les peuples sont capables de jouir des bienfaits matériels de l’occident, peu sont capables de créer eux-mêmes une civilisation de ce genre. D’autres peuples ont créé des civilisations de type différent. L’occident sera détruit par l’immigration.

    La croissance de la population française : rappel historique

    Les effets de l’augmentation de la population avaient éveillé l’intérêt du pasteur-économiste Malthus au XVIIIe siècle, lorsque Benjamin Franklin décrivait les colonies anglaises où la population avait doublé en 25 ans (3). Le pasteur Malthus s’interrogea sur l’équilibre entre population et ressources. Or, dans l’Europe du XIXe, l’équilibre fut trouvé. Comment ?

    En France, selon l’historien Michel Morineau, l’accroissement démographique conduisit, jusqu’aux années 1840-1850, à un système d’exploitation complexe destiné à élever les ressources au niveau des bouches à nourrir. À titre complémentaire, certaines catégories de la population en âge de travailler effectuaient des migrations temporaires ou se livraient à de nouvelles activités commerciales. En même temps, l’industrialisation, en tuant l’artisanat paysan, provoqua de partout la pauvreté. Celle-ci fut éliminée peu à peu par des activités de remplacement, à condition d’accepter le passage de la migration temporaire à la migration définitive. C’est dire que l’exode définitif des populations quittant la terre fut acquis parce qu’il existait des offres d’emplois en ville, avec un revenu, ou des terres vierges à mettre en valeur dans le monde. Rien de tel aujourd’hui. Les diasporas du monde entier bénéficient d’un revenu par l’intermédiaire de prestations sociales multiples, utilisent gratuitement les services collectifs, mais n’ont pas d’emplois durables car le problème actuel est d’ordre qualitatif : la technologie requiert des compétences précises en termes de métier et des qualités personnelles solides : claire compréhension d’une langue, des usages, des modes de raisonnement et des références culturelles.

    L’existence de diasporas multiples a déjà engendré des problèmes qui comptent parmi les plus importants et les plus difficiles de notre époque. La contrainte incessante à l’immigration est une source de conflits permanents car elle ôte à la population autochtone l’espace dans lequel ses enfants auraient pu agir. Les Européens de vieille souche y voient une menace pour la vie et l’avenir de leur descendance.

    La rupture du lien entre générations

    Dans l’installation de colonies de peuplement, deux mouvements se superposent :

    • Nombre d’immigrés viennent parce que leur pays ne leur donne pas une instruction solide ou n’offre pas assez de travail. D’aucuns affirment faussement qu’ils paieront les retraites des Français en phase de vieillissement de leur pyramide des âges. Mais les jeunes que les pays pauvres envoient le plus facilement en France sont les moins formés. Entretenus sans effort, ils subsistent massivement par le branchement sur les mécanismes d’assistance et de protection sociale. Ces immigrés sont inutilisables dans les conditions technologiques actuelles. Ils ne seront jamais en mesure de financer la retraite des Européens.

    • Des jeunes immigrés sont éduqués dans leur pays puis viennent en France. C’est le drainage des cerveaux issus des pays pauvres, dans des conditions culturelles difficiles.

    Les problèmes soulevés par ces diasporas sont multiples. Au niveau macroéconomique, le prix Nobel Maurice Allais les expose de la manière suivante : « C’est un fait que dans les différents pays le capital national reproductible est de l’ordre de quatre fois le revenu national. Il résulte de là que lorsqu’un travailleur immigré supplémentaire arrive, il faudra finalement pour réaliser les infrastructures nécessaires (logements, hôpitaux, écoles, universités, infrastructures de toutes sortes, installations industrielles, etc.) une épargne supplémentaire égale à quatre fois le salaire annuel de ce travailleur. Si ce travailleur arrive avec sa femme et trois enfants, l’épargne supplémentaire nécessaire représentera suivant les cas dix à vingt fois le salaire annuel de ce travailleur, ce qui manifestement représente une charge très difficile à supporter » (4). Or, la part de l’épargne fixée par les investisseurs institutionnels (fonds de pension, fonds communs de placement, OPCVM) s’est presque partout très fortement accru. Il y a concentration de la gestion de l’épargne entre les mains de professionnels ouverts aux opportunités du marché global, qui placent en titres libellés en différentes monnaies. L’État n’est plus qu’un emprunteur parmi d’autres et, déjà sur-endetté par la politique des factions qui le contrôlent, se rabat sur l’épargne forcée, le pillage des classes moyennes versant un Tribut croissant en faveur du gouffre sans fonds de la protection sociale.

    La seconde question clairement identifiable est celle de l’équité intergénérationnelle. L’équité, ou justice commutative, impose de faire en sorte que chacun reçoive en proportion de ce qu’il apporte. L’équité se préoccupe d’équivalence : il faut assurer un traitement équitable entre les générations. Or, les diasporas détruisent l’équité. Les diplômés originaires des pays en développement, souvent confrontés à des perspectives de gain médiocres dans leur pays, et à un environnement technologique limité, préfèrent s’installer en France, en sorte que « si nous parvenons à prendre ces jeunes aux sociétés qui les ont formés et envers lesquels ils ont des devoirs, nous commettons un véritable vol et nous privons le tiers monde de sa seule chance de développement » (5). L’investissement dans la jeune génération, consenti par leurs aînés, est perdu et la dette de ces étudiants à l’égard de leur pays n’est pas remboursée. Aux conséquences délétères pour le développement de ces régions s’ajoute l’injustice d’une dette non remboursée.

    Recréer l’harmonie

    Une solution alternative consiste, selon l’analyse de l’économiste J. Bichot, à stopper le nouveau commerce du bois d’ébène en explorant la piste suivante : « Ne donner à un diplômé d’un pays pauvre l’autorisation de venir exercer une activité professionnelle dans un pays riche que dans la mesure où, en sens inverse, un technicien du Nord irait exercer ses talents au Sud » (6). Il s’agit de respecter le principe d’un échange équitable : celui qui se rend utile a des droits, celui qui déçoit a des devoirs.

    La contribution apportée par la France à l’instruction des ressortissants du monde entier est considérable, comme le montre toute visite des établissements d’enseignement. Cela est inique ! Rien n’est comptabilisé ! La valeur de la formation dispensée aux étudiants étrangers devrait être facturée et, par un échange équitable, la "matière grise" importée de l’étranger serait payée.

    Ce principe se substituerait à l’injustice actuelle où le plus grand nombre des diplômés appartenant aux multiples diasporas évite de rembourser les dettes dues à leur pays d’origine ; où les non qualifiés préfèrent vivre en France du RMI et de diverses prestations plutôt que de demeurer sans emploi dans leurs pays.

    Erreur sur le coût du travail

    Pour faire semblant de lutter contre le chômage, le premier ministre a proposé de réduire les charges sociales des entreprises et d’accroître, à la place, les prélèvements sur les revenus de la population. Mais, pour les entreprises dans leur ensemble, le coût du travail ne changera pas. Que les charges sociales soient payées sous la forme de cotisations ou sous la forme d’impôts sur les revenus des ménages (cas du Danemark par ex.), les salariés demanderont une compensation à cette fiscalité par des salaires nets plus élevés. Le vrai problème est le coût global du travail (salaires plus charges) comparé à sa productivité. Or, les colonies de peuplement provoquent des distorsions sur les salaires de certaines activités et sur la productivité de nombreux secteurs. L’iniquité va consister à appauvrir l’ensemble de la population au profit des diasporas qui subsistent de notre subsistance.

    Les hommes ne sont pas interchangeables, sauf dans les délires religieux, lorsque la race autoproclamée supérieure des bergers encadre le bétail, vaste masse d’impurs mêlés dans le pandémonium de toutes les nations dissoutes. Les tyrans capitalo-théocratiques de l’occidentisme méprisent les facteurs qualitatifs, les grâces spécifiques des peuples et des patries, comme des brutes pédophiles qui veulent les violer dans un fossé le sont aux minauderies des enfants. Mais c’est un suicide, car la culture professionnelle est un pilier fondamental de notre civilisation. Forgée au cours des siècles, elle permet à des millions d’individus d’exécuter correctement leur travail. Or, l’arrivée massive de diasporas du monde entier, qui en sont dépourvus, a entraîné une transformation de celle-ci. Une conséquence de cette inadéquation est la baisse des normes culturelles et professionnelles. Une autre est l’extension indéfinie du prélèvement obligatoire sur les revenus professionnels pour financer le niveau de vie des nouveaux occupants.

    Questions annexes

    L’installation de colonies de peuplement pose enfin deux questions annexes qui ne sont pas sans importance.

    • Mircea Eliade, grand spécialiste de l’histoire des religions, a décrit dans son Journal des Indes (7), la méthode préférée des Anglais. Ils payaient quelques voyous pour jeter un porc égorgé dans la cour d’une mosquée. Les musulmans lançaient des émeutes, de connivence avec la police anglaise qui intervenait seulement quand un Hindou prenait les armes pour se défendre. Les colonies de peuplement rendent peut-être des services auxquels un travailleur du monde de la technique ne pense pas…

    • La société occidentale tend vers une société du crime (8). Sous sa forme externe, le crime se présente comme mise à sac de la totalité de la planète. Alors, tout comme l’extinction des espèces ou la pollution généralisée du globe, la migration annoncée par Boumedienne est l’une des participations au crime, déguisée en vertu.

    ► Ponocrates, Nouvelles de Synergies Européennes n°40, 1999.

    • 1. Alexandre Zinoviev : L’Occidentisme, Essai sur le triomphe d’une idéologie, Plon, 1995.
    • 2. Zinoviev fait dire à l’un de ses personnages littéraires : « Un jour, le muezzin criera "Allah akhbar!" du haut de la tour Eiffel ».
    • 3. Au Canada français, la population était passée de 60.000 personnes en 1760 à 127.500 en 1790. En Nouvelle-Angleterre, aux mêmes dates, elle était estimée respectivement à 459.000 et 923.865 personnes. D’après Michel Morineau : « Malthus au village ». Dans : Pour une histoire économique vraie, PUL, 1985, pp.493-512.
    • 4. Maurice Allais : L’Europe face à son avenir : que faire ?, R. Laffont/C. Juglar, 1991, p.99.
    • 5. Jacques Bichot : Quelles retraites en l’an 2000 ?, A.Colin, 1993, p.60.
    • (6) J. Bichot : Ouvrage cité, p. 124.
    • (7) Mircea Eliade : Journal des Indes, L’Herne, 1992, p.128.
    • 8. Christian Carle : La société du crime, Les éditions de la passion, 1996.

     

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